Un peu plus de six mois après que l’Organisation mondiale de la santé a déclaré l’état de pandémie, la vague de Covid-19 est toujours aussi virulente. Il y aura bientôt eu 30 millions de cas dans le monde et presque un million de personnes sont mortes. Les scientifiques et les médecins connaissent mieux la maladie, mais si l’offre de soin a évolué, il n’y a à l’heure actuelle toujours aucun traitement « miracle ».
Il y a deux façons de lutter contre le Covid-19 : s’en prendre au Sars-CoV-2, le coronavirus qui provoque la maladie, avec pour objectif de le supprimer du corps des malades. Pour y parvenir, il faut faire usage des bien nommés antiviraux. Malheureusement, aucun n’a aujourd’hui fait preuve d’efficacité. L’autre option consiste alors à limiter les dégâts que le virus occasionne. Ils sont de deux types : ceux provoqués par le Sars-CoV-2 lorsqu’il « pirate » les cellules du patient pour s’y répliquer, et ceux occasionnés par notre système immunitaire lui-même. Dans les formes graves, il arrive en effet à ce dernier de s’emballer et de provoquer des dommages collatéraux, sous forme d’inflammations.
Dans ce dernier cas, les médecins commencent à avoir des outils à dispositions. « Ces traitements-là permettent de prévenir la survenue de l’inflammation qui endommage les poumons, le cœur, les reins », explique le Pr Djillali Annane, chef du service de médecine intensive-réanimation à l’hôpital AP-HP Raymond Poincaré de Garches. « Si on les administre dans les formes plus sévères, ils permettent de la limiter ». L’utilisation des corticoïdes a donc ce double avantage de soulager les cas graves et de limiter la dégradation de l’état des personnes moins touchées. Ces dernières auront donc moins souvent besoin d’être admises en service de réanimation, limitant ainsi un engorgement comme on a pu le voir au printemps dernier en France.
L’intubation toujours utilisée
S’il est compliqué de prédire de quelle façon va évoluer l’épidémie, le risque de saturation des services de réanimation reste à envisager. Un facteur limitant n’a en effet que peu évolué : la durée d’hospitalisation. Elle peut atteindre plusieurs semaines voire plus d’un mois pour les patients atteints d’une forme grave du Covid-19, restreignant mécaniquement la disponibilité des lits. Cette longue durée s’explique en partie par l’intubation et la nécessité de placer les patients en coma artificiel.
Cette procédure très invasive et lourde est en effet toujours utilisée dans les services, même si on essaie désormais de la limiter le plus possible. « Un nombre encore important de patients ont besoin d’être intubés et placés sous coma artificiel », raconte le Pr Annane. « La gravité des cas n’a pas diminué. Le virus n’a pas perdu en capacité de nuire à l’organisme : il n’y a pas aujourd’hui un virus qui est moins dangereux. On s’attend donc à avoir toujours un nombre important de patients à intuber et à placer sous coma artificiel pour pouvoir assurer une oxygénation correcte de leur sang ».
L’efficacité des anticoagulants
L’oxygénation et les corticoïdes ne sont cependant pas les deux seules armes des médecins face au coronavirus. En plus des dommages causés par le coronavirus lui-même et les inflammations, le Covid-19 se manifeste par une troisième composante : la maladie thromboembolique. Il s’agit de caillots de sang qui se forment dans les poumons. Les médecins administrent donc des anticoagulants pour prévenir leur formation. « Tous les patients en réanimation en France » en reçoivent de manière préventive selon Djillali Annane. Jusqu’à récemment, on ne disposait cependant que de très peu de données pour évaluer leur efficacité.
Celles-ci commencent néanmoins à être disponibles. Ainsi une équipe de l’hôpital du Mont Sinaï de New York a publié dans le Journal of the American College of Cardiology les résultats d’une étude rétrospective concluant à une bonne efficacité des anticoagulants administrés dans ce cadre. Ainsi, cette équipe a observé que leur utilisation de manière préventive était associée à une diminution de 50 % de la mortalité des malades par rapport à ceux qui n’en recevaient pas. Pour les cas les plus graves, la mortalité était réduite de 47 %.
Les auteurs soulignent également que leur usage est également lié à un moindre recours à l’intubation. Ces données ne concernent cependant qu’une seule étude à bas niveau de preuve et demandent donc à être confirmées et étendues, mais elles sont prometteuses.