Cette statue qui se dresse derrière moi au musée national de Sandervalia, ce fier peul au visage ascétique est un farouche résistant à la pénétration coloniale en Guinée et une figure de proue de l’islam foutanien : il s’appelle Thierno Ibrahima Waliou N’Dama.
Ce grand Homme naquit en 1824 à Himaya et reçut une brillante formation théologique à Touba auprès de Karamoko Koutoubou de Touba.
Son père Thierno Diao fut un irréductible continuateur de la rébellion Hubbu dans le fouta, après la répression sanglante de ce mouvement dissident par les princes Barry de Timbo en coalition avec l’Almamy Samory Touré en 1884.
Le royaume de N’Dama, longtemps vassal du grand Diwal de Labé, s’affranchit peu à peu et devient indépendant sous le règne du Waliou de N’Dama qui étendit ses conquêtes sur la basse casamance jusqu’en Gambie dont il achèvera l’islamisation.
Le roi de Labé Alpha Yaya Diallo acceptera difficilement cette sécession et n’acceptera jamais que son vassal soit son rival…
Alors une lutte à mort sera engagée entre les armées de Labé et les troupes du Badiar, de la Casamance et de la Gambie.
Cette faille dans l’unité du Fouta, sera une aubaine pour l’armée coloniale conduite par le Lieutenant Noirot qui profitera de cette guerre fratricide pour lancer une attaque fulgurante sur le royaume de Thierno Ibrahima. Le 10 mai 1899, les troupes du Waliou de Gomba renforcée (selon la légende) par une armée d’abeilles mirent en déroute les colonnes françaises et les pourchassèrent jusqu’aux confins du Sénégal…
Les envahisseurs français bénéficiant d’une complicité interne, reviendront par surprise en 1901 et attaqueront le camp retranché du vaillant guerrier qui sera arrêté le 8 mai 1901.
Thierno Ibrahima sera déféré à Conakry, où il fondera le quartier de Boussoura qui lui servit de résidence surveillée durant tout son procès.
Notre saint-homme sera reconnu coupable de rébellion par l’administration coloniale et condamné à perpétuité en 1902.
Il sera deporté avec tous ses fils, à Pointe-Noire au Congo où il mourut la même année des suites de mauvais traitements.
Sa tombe se trouve dans le petit village de Louango au Congo sans aucune attention particulière.
Rappatrier ses cendres en Guinée a été un combat acharné que j’ai personnellement livré quand j’étais Ministre de la Culture, malheureusement je ne réussirai pas ce pari…
Honneur et gloire éternelle à nos fiers martyrs, vous êtes morts pour notre liberté mais vous vivrez éternellement dans nos cœurs et dans nos esprits !!!
Siaka Barry