Mesdames et messieurs les membres du Comité National du Rassemblement pour le Développement CNRD ;
Mesdames et Messieurs les Présidents des Institutions Républicaines ;
Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement ;
Honorables Conseillers Nationaux ;
Mesdames et messieurs les membres du Gouvernement ;
Mesdames et messieurs les Représentants du corps diplomatique et consulaire ;
Distingués invités, en vos rangs, titres, grades et qualités respectifs ;
Nous avons écouté avec attention le mot de bienvenue de la Vice-Présidente de la Commission Constitution, Lois Organiques, Administration Publique et Organisation Judiciaire (CCLOAPOJ) qui a planté le décor du Symposium, avec une claire projection sur l’autre étape du processus constitutionnel, le Débat d’Orientation Constitutionnelle (DOC).
Elle a présenté succinctement, mais avec précision, le périmètre et les objectifs de ce Symposium. Qu’ai-je à dire de plus ? Sinon réaffirmer, avec humilité et une déterminante fermeté que la séance plénière de ce mercredi 21 février 2023, consacrée à l’ouverture du Symposium sur le Constitutionalisme fera date dans l’histoire des Transitions en République de Guinée, puisqu’elle prépare voir même inaugure, une étape importante de l’élaboration de la nouvelle Constitution indiquée précédemment.
Le symposium a été lui aussi précédé par la tournée de consultation des populations des 33 préfectures, 6 communes de Conakry, sur leurs attentes, aspirations, et préoccupations en lien avec la Transition, notamment le CNT. Cette consultation a mis en exergue une panoplie de préoccupations : la nécessaire réorganisation du paysage politique autour d’idéologies politiques majeures qui résisteraient à l’ethnocentrisme et limiteraient la prolifération anarchiques de partis politiques ; la réorganisation des pouvoirs publics : un présidentialisme modéré, un pouvoir législatif représentatif de la diversité politique et socio-régionales et un pouvoir judiciaire renforcé et exsangue de toutes influences négatives des autres pouvoirs), pour renforcer non seulement leur indépendance, mais aussi et surtout leurs interactions autour de leurs missions républicaines ; la décentralisation achevée jusqu’au niveau régional, basée sur une réelle autonomie des collectivités, l’indépendance et la primauté de la justice comme vectrices de la réconciliation et de la bonne gouvernance,
Le symposium dans sa conception idyllique est l’étape d’éclairage conceptuel et académique du Constituant qu’est le CNT par une expertise académique nationale et internationale, sur l’historique du Constitutionnalisme guinéen, les choix en termes de politiques et de pratiques constitutionnelles, les relations entre les pouvoirs et le mécanisme de dévolution du pouvoir.
Le Débat d’Orientation Constitutionnel, consecutif au symposium, sera un moment privilégié de dialogue citoyen inclusif et d’échanges constructifs sur la consubstantialité ‘’République – Nation – Etat’’, qui doit être perçue et vécue, à l’évidence, comme une réalité concrète, gage de l’unité nationale, de la cohésion sociale et du renforcement du lien ombilical de chaque citoyenne et citoyen guinéen avec la mère patrie. En termes clairs, le Débat d’Orientation Constitutionnelle est un dialogue instauré directement entre les Conseillers nationaux et les acteurs majeurs du processus dans une solennité républicaine : Coalitions politiques, les organisations de la Societe civile, les légitimités traditionnelles, Chefs religieux, l’Administration publique, les autres Institutions Républicaines, etc.
Le Symposium, dont nous ouvrons les travaux, constitue une étape, pour chaque Conseiller National, de se livrer à une introspection profonde, lui permettant d’apprécier son arrimage à l’esprit et à tout le contenu de notre mission Républicaine, conformément aux dispositions de la charte de la transition.
La Charte de la transition éclaire la transition, comme les mouvements de liberté et de construction d’une nation, à travers les temps et les pays, revêtent la même forme : l’instauration et le respect de la loi, qui concrétise les garanties d’exercice et de jouissance des libertés et des droits.
Honorables Conseillers nationaux
La longue expérience d’exercice de la souveraineté de notre pays, révèle que la pratique institutionnelle était fortement érodée par des dysfonctionnements majeurs, à la limite de la déliquescence de l’Etat, qui ont engendré cycliquement des ruptures de l’ordre constitutionnel, en avril 1984, décembre 2008 et septembre 2021. Trois ruptures avec des motivations variées et des justifications légitimes les unes des autres. Mais la plus récente, celle de septembre 2021 a eue la particularité d’arrêter un désordre institutionnel et administratif sans précédent et surtout le mérite de restaurer au peuple guinéen sa liberté, sa dignité et retrouvé l’espoir volatilisé après le forcing constitutionnel de 2020. Ces épreuves et épisodes de violations, de violences et répressions ont profondément blessé, abusé, humilié et surtout déçu les guinéens. De toutes évidences les guinéennes et les guinéennes attendent des institutions de la Transition, notamment le CNT, dans la collégialité une réponse claire, de leurs incertitudes, inquiétudes, interrogations et craintes face à l’avenir.
En guise d’exemple, de nombreuses interrogations étaient itérativement soulevées, quant à la solidité, l’opportunité et la pertinence des différentes institutions, quant aux rapports entre elles et quant au fonctionnement du régime constitutionnel, de manière générale et du système électoral, en particulier.
La construction d’un régime constitutionnel doit, de toute évidence, être un chantier de longue haleine, dont la réalisation évolutive exige de chaque génération d’apporter sa pierre à l’œuvre d’édification collective et permanente, d’où la nécessité de concilier tout le temps l’intangibilité et la mutabilité de la Constitution pour consolider la stabilité et la continuité de l’Etat.
Les incantations ou les montages politico-juridiques, destinés à asseoir ou à perpétuer la domination de certains groupes ou spectres de la société sur d’autres s’établissent inéluctablement dans le mépris du respect de la constitution ou les violations des lois et des valeurs morales consacrées. Ces pratiques anti démocratiques ne peuvent féconder le civisme, la stabilité, la paix et le développement de la nation.
En démocratie, on ne peut pas gouverner par le monologue et le monolithisme. Le pluralisme et la diversité adossés à la règle de droit sont le ciment de la République et le ferment de l’inaltérabilité des règles et de l’unité nationale. On a conséquemment l’obligation morale, impérieuse et permanente de respecter les lois du pays, de procéder par la transparence, l’alternance démocratique, l’exercice de toutes les libertés et la jouissance de tous les droits. La redevabilité et l’équilibre des pouvoirs forment l’essence et le fondement même de la démocratie.
C’est pour cette raison impérative, comme l’ont éloquemment soulignés les précédents intervenants, que ce Symposium sera suivi de séances consacrées au Débat d’Orientation Constitutionnelle, à l’occasion desquelles seront invitées, inclusivement, donc sans exception, toutes les composantes de la nation. Nous espérons qu’il n’y aura ni résistance, ni absence de quelque organisation ou coalitions d’organisations que ce soit.
Honorables Conseillers nationaux
Le contenu des Termes de Référence du Symposium, qui vient de nous être résumé, rappelle que nous avons décidé, conscients de nos responsabilités, qu’avant tout débat sur les orientations que nous allons recueillir, dans la perspective de l’accomplissement de notre mission principale, celle d’élaborer pour adoption, par référendum la nouvelle Constitution, se tiendrait le présent Symposium sur le Constitutionnalisme.
Il nous permet de recevoir de diverses sources l’éclairage nécessaire à la compréhension des règles, des procédures et concepts inhérents ou indispensables à la rédaction d’une Constitution, de l’envergure de celle, dont nos populations ont esquissé le pourtour, sans ambiguïté.
Nous avons jugé utile, et plus opérant, d’inviter des experts et de hautes personnalités expérimentées, de bonne réputation, d’ici et d’ailleurs pour bénéficier de leurs lumières, sur une matière aussi importante et complexe que la Constitution.
Il y a, au sein du CNT, d’éminents hommes de droit, certes ; mais la Constitution n’est pas l’affaire que des seuls juristes. Au demeurant, ses règles régissent des questions et des matières, qui appellent de nombreuses autres connaissances, en plus de celles des sciences juridiques.
Honorables Conseillers nationaux
Nous avons diversement parlé ou entendu parler de Constitution et de Constitutionnalisme, avec plus ou moins de précision ou de confusion, dont la conséquence pourrait être source de polémique ou de controverses, pouvant faire inutilement perdurer nos travaux.
Or, nous avons un chronogramme à respecter ponctuellement, et nous en avons individuellement fait promesse et pris l’obligation solennelle, qui s’y attache.
Le présent symposium, nous l’espérons, va nous familiariser avec le concept de Constitutionnalisme et avec les notions qui lui sont inhérentes, subséquentes ou consubstantielles.
Bien entendu, il ne nous est pas étranger que le pouvoir d’Etat et les libertés et droits fondamentaux doivent être garantis par une loi fondamentale, généralement sous la forme d’un texte écrit, dénommée la Constitution.
C’est ce qui nous amène logiquement à une première compréhension utile, qui doit retenir notre attention durant toute notre mission ; à savoir que le constitutionnalisme :
1. est fondé sur la suprématie de la Constitution dans la hiérarchie des normes juridiques, en particulier celle des lois, entendue sui generis ;
2. est un moyen de limitation des pouvoirs.
La deuxième compréhension utile à retenir est que la Constitution pourrait se subdiviser, d’un point de vue conceptuel, en trois parties principales, qui mettent en évidence que la Constitution ne porte pas que sur les pouvoirs d’État, mais elle est aussi :
1. Constitution-garantie de libre exercice de la Souveraineté, en vertu de laquelle, chaque peuple a le droit permanent, inaliénable et souverain de :
i. déterminer la forme de son régime politique ;
ii. choisir librement ses représentants ;
iii. disposer sans entraves de ses richesses et de ses ressources naturelles ;
2. Constitution-garantie des libertés et droits, qui a pour projet la société des individus et pose les principes de garantir à tout citoyen son indépendance par rapport aux pouvoirs politique et économique et l’égalité par rapport à ses concitoyens ;
3. Constitution-séparation des pouvoirs, qui favorise un régime de production de la volonté générale par divers organes ou institutions et fondé sur l’équilibre et la collaboration des pouvoirs.
Il résulte, de ce que je viens de dire, que la constitution n’est pas la loi fondamentale de l’État seul, mais elle est également celle de la société.
En effet, toutes les activités et situations des individus, saisies par le droit, peuvent être rapportées à la Constitution.
La troisième connaissance utile à retenir concerne la délibération, qui n’est un principe actif du régime concurrentiel d’énonciation de la volonté générale, à travers des règles ou normes, que par l’intermédiaire ou sous l’empire du droit et, en particulier, des droits fondamentaux de valeur constitutionnelle, qui gouvernent la réalisation de l’activité collégiale délibérative de l’ensemble des organes régaliens et des institutions d’appui à la démocratie, à la transparence et à la bonne gouvernance.
Honorables Conseillers nationaux ;
Mesdames et messieurs,
Distingués invités ;
Le contexte de la refondation de l’Etat et de la rectification institutionnelle nous pousse, à travers ce Symposium et le Débat d’Orientation Constitutionnelle devant le suivre, à l’effort de trouver les mécanismes et règles constitutionnelles permettant de rendre à notre pays, la Guinée, son destin de pionnier des indépendances, d’avant-garde de l’émancipation africaine.
El Hadj Biro, centenaire et remarquable compagnon de l’indépendance de notre pays, nous disait, chez lui, à Mamou, avoir visiter les cinq (5) continents et les deux (2) pôles et n’avoir jamais vu un pays, doté par Dieu de tant de ressources naturelles et de potentiels de développement, comme la Guinée. Alors, il nous appartient de serrer la ceinture et de retrousser les manches pour trouver les voies et moyens et créer les conditions optimales, pour faire profiter les Guinéens de cette incommensurable mansuétude divine.
Sur ces mots, je déclare ouvert au nom du President de la Transition, Chef de l’Etat, Chef suprême des armées, le Symposium sur le Constitutionnalisme et souhaite la baraka de Dieu pour le plein succès à nos travaux.