Au Mali, le Premier ministre Choguel Maïga a confirmé officiellement jeudi 8 juillet son projet de mettre en place un organe unique de gestion des élections, dans la perspective de la future présidentielle qui doit mettre un terme, en février prochain, à la période de transition. Mais ce projet soulève beaucoup de questions sur sa mise en œuvre. Dans une note d’orientation commandée par Choguel Maïga, plusieurs experts ont émis leurs recommandations.
Ce projet de mise en place d’un organe unique de gestion des élections est réclamé de longue date par de nombreux partis politiques maliens et par les organisations de la société civile. On se souvient que c’est notamment la contestation des dernières législatives qui avait provoqué la vague de contestation contre le président Ibrahim Boubacar Keïta, finalement renversé par le coup d’État du 18 août dernier. Mais c’est suite à ce coup d’État justement et dans le contexte actuel de transition, que beaucoup craignent que cette structure soit installée dans la précipitation, ou qu’elle ne serve au contraire de prétexte pour allonger la période de transition. Beaucoup craignent également que les militaires au pouvoir cherchent à contrôler plus facilement cette structure unique.
À ce jour, les élections maliennes relèvent de trois structures différentes, une spécificité en Afrique de l’Ouest et même sur le continent. Le ministère de l’Administration territoriale, qui organise matériellement le scrutin et proclame les résultats qui sont ensuite validés ensuite par la Cour constitutionnelle, la Délégation générale des élections, une structure autonome qui gère le fichier électoral, les cartes d’électeurs et le financement public des partis et la Commission électorale nationale indépendante, la Céni, « gendarme » qui contrôle le déroulement du vote et émet des avis au ministère de l’Administration lorsqu’elle observe des manquements et effectue son propre comptage des voix, en parallèle de celui du ministère.
Un organe indépendant
Dans une note d’orientation commandée par le Premier ministre Choguel Maïga le mois dernier, plusieurs experts – un chercheur, un magistrat, un observateur de la société civile et un ancien président de la Céni – recommandent que les compétences du ministère de l’Administration territoriale, qui ne saurait, selon eux, être considéré comme « neutre », soient tout simplement transférées au nouvel organe indépendant. Une sorte de nouvelle Céni aux pouvoirs élargis. La Délégation générale des élections, en deviendrait un service technique, avec interdiction pour ses dirigeants d’exercer toute fonction politique ou administrative, et d’avoir une activité privée.
Pour garantir son indépendance, les experts maliens recommandent que le nouvel organe soit composé au niveau national de 15 membres, désignés par les partis politiques « en suivant une répartition égale entre les partis », par les organisations de la société civile spécialisées dans les élections et, dans une moindre mesure, par des représentants des confessions religieuses et des organisations de magistrats, d’avocats, de défense des droits de l’homme, des associations féminines. Le président de la nouvelle structure serait ainsi obligatoirement issu de la société civile.
Les experts suggèrent « que l’organe de gestion des élections puisse avoir sa source au niveau de la Constitution », afin d’en renforcer la légitimité. Le « défi majeur », notent enfin les auteurs de cette note d’orientation, sera de mettre en œuvre ces changements dans le délai imparti pour la période de transition.