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GUINEE- Quelle boussole pour notre Nation? (Par Ahmed Kourouma)

 

Voilà bientôt un an que notre pays a de nouveau été marqué par de brusques changements. D’aucuns diraient que ce nouveau régime est salutaire, d’autres que nous sommes encore dans une obscure et inique junte militaire. Mais ce sur quoi nous pouvons tous nous accorder, est que nous sommes dans l’espérance et la spéculation.

Le nouveau chef de l’Etat est plutôt avare de mots, et ses prises de paroles ne suffisent plus à alimenter l’espoir que nous avions ouvertement ou secrètement pour ces dits changements.

Il n’y a qu’à passer une journée dans n’importe quelle ville, à la rencontre de n’importe quel citoyen pour comprendre le message effacé ou direct qu’il y a sur toutes les lèvres.

Soit, le Chef de l’Etat est frugal dans sa communication, c’est un officier, un homme d’action, et il l’a prouvé. Seulement oui, j’entends bien que l’Histoire est aussi faite d’hommes d’actions, de militaires, qui se sont dressés contre un régime qu’ils pensaient arbitraire, vieillissant ou injuste.

Et c’est là tout le problème.

Un Coup d’Etat n’est pas une Révolution, parce qu’en soit le peuple a rarement droit au chapitre dans ces moments-là.

Alors si le peuple ne peut plus s’exprimer, il est attentif certes, mais attentiste aussi, impatient même, et s’il est impatient il en devient anxieux.

L’on se souvient du Coup d’Etat du 18 Brumaire, lorsque Bonaparte qui n’était pas encore Napoléon, n’a pas su s’exprimer devant le Conseil et n’a dû son Salut qu’à son frère, Lucien, l’orateur, le tribun.

Oui les grands hommes d’actions, ne sont pas toujours des communicants.

Et souvent parce que c’est l’Histoire qui a fait appel à eux, le tournant d’une époque, d’un événement, appelons cela comme on veut, mais être présents au moment opportun ne fait pas d’eux des opportunistes. Ils étaient rarement prêts à assumer une fonction aussi haute, mais lorsque le Rubicon est franchi il faut l’assumer. Tout comme notre président aujourd’hui.

Que notre président soit un homme action est une chance, enfin ! Que l’on ne s’y trompe pas, car désormais notre pays a besoin d’actes, mais le peuple a aussi besoin de mots, d’explications liminaires sur les chemins empruntés.

Bien sûr que nous voulons du changement après tous ces bouleversements, après tous ces faux espoirs et miroirs aux alouettes de ces décennies passées, oui nous espérons construire enfin une grande Guinée à l’aide de toute sa force vive et pensante.

Mais notre pays a un besoin urgentissime de clarté, de visibilité, plus d’un phare que d’un grand Timonier.

Il est devenu insupportable, intolérable même, qu’après toutes ces années de marasmes et ces quelques mois d’espérance, le peuple soit de nouveau laissé pour compte. Je ne crois pas, ni ne dis, que nous, le peuple, ne soyons pas la préoccupation première de notre nouveau Président. Mais si nous sommes la priorité de ce changement, nous sommes prêts à être patients, attentifs, mais en aucun cas perdus dans l’ombre de ceux qui décident pour nous aujourd’hui. Ce n’est pas parce que le peuple est laissé en retrait qu’il est à l’abri, nous savons depuis longtemps que notre pire ennemi reste nous-même. Nous, oui, lorsque nous sommes sujets à nos doutes, nos craintes, une main devant les yeux à tâtonner vers un avenir que l’on n’ose même plus concevoir. Oui, c’est là que pour telle ou telle raison, sous telle ou telle invective nous descendons dans la rue, scandant, démolissant, frappant et surtout blessant un équilibre encore trop précaire pour nous satisfaire aujourd’hui.

C’est là que nous sommes dangereux, et pour nous-mêmes.

Je ne connais pas un seul guinéen, une seule guinéenne, qui aujourd’hui ne souhaite pas la réussite du Président Doumbouya. Moi comme tous et moi comme eux, j’entendais le président parler clairement de chronogrammes, parler clairement de sa vision pour la Guinée et de ce qu’il voulait voir disparaître, changer. Nous sommes un peuple uni lorsque l’on nous considère comme tel. Et pour cela il faut nous responsabiliser, nous avertir des dangers et des efforts à fournir et seulement là nous serons droits et fiers de suivre enfin cette lueur que nous attendions tous depuis si longtemps, cet espoir qui se refusait à nous. Notre président veut nous réconcilier avec nous-mêmes, il veut que nous nous aimions, et nous le voulons tous aussi. Mais il doit savoir qu’il nous importe peu que le changement soit en place et les réformes en branle, nous voulons d’abord connaitre la nature du souffle qui nous porte. Et peu importe si c’est une bourrasque ou une simple brise, puisse-t-elle-même être une tempête, nous serons vent debout avec notre président si tant est qu’il nous ouvre les yeux et nous présente sa carte et sa boussole. Rien de plus.

 

 

Ahmed kourouma
Journaliste
Hadafo Media

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