KIOSQUE : Il existe des cancers de riches et des cancers de pauvres

Les cancers des lèvres-bouche-pharynx, de l’estomac et du foie sont davantage observés parmi les populations défavorisées. Au contraire, les cancers de la prostate chez l’homme ou de l’ovaire chez la femme, sont plus fréquents dans les zones aisées. C’est la conclusion du Bulletin épidémiologique hebdomadaire publié le 7 février par Santé Publique France.

Au total, près de 15.000 cancers, liés aux conditions socio-économiques défavorables, pourraient être évités chaque année, affirment les auteurs de l’étude. Ce surrisque est plus important chez les hommes que chez les femmes, et maximal pour le cancer du poumon.

Facteurs de risques

Chez les hommes, la hausse du risque de cancer attribuable au milieu social défavorisé était la plus importante pour les cancers du larynx (30,1% de risque en plus d’en souffrir par rapport à une personne vivant dans un milieu favorisé), des lèvres-bouche-pharynx (+26,6%) et du poumon (+19,9%). Chez les femmes, cela concernait principalement les cancers des lèvres-bouche-pharynx (+22,7%) et du col de l’utérus (+21,1%). «La détermination sociale de certains facteurs de risque comme la consommation de tabac, les expositions professionnelles ou les polluants atmosphériques explique sans doute une partie importante des différences observées», expliquent Joséphine Bryère, chercheuse à l’Inserm, et ses collègues.

L’étude montre également, ce qui est nouveau, que d’autres cancers (foie, estomac, pancréas et vessie) peuvent également être plus fréquents dans les populations défavorisées, indique Guy Launoy, professeur à l’Inserm-Caen et au réseau national des registres des cancers (Francim), co-auteur de l’étude. Pour le moment, aucune cause de cette surreprésentation n’a été définie.

Mélanome plus fréquent dans les populations favorisées

Autre résultat de l’étude: certains cancers sont au contraire plus fréquents chez les personnes vivant dans un milieu social favorisé. C’est le cas du mélanome pour les deux sexes, des cancers de la prostate et du testicule chez l’homme, et des cancers du sein et de l’ovaire chez la femme.

«La surreprésentation du cancer de la prostate dans les milieux les plus favorisés, et dans une moindre mesure pour le cancer du sein, est sans doute très liée aux pratiques de dépistage plus fréquentes dans ces milieux et, pour la prostate, au surdiagnostic très important constaté pour ce cancer qui évolue extrêmement lentement», explique le Pr Launoy à l’AFP. En revanche, pour le moment, rien ne permet de comprendre la surreprésentation des cancers de l’ovaire, du testicule et du mélanome dans ces milieux.

Près de 190.000 cas de cancers

L’analyse, première du genre en France, a porté sur 189.144 personnes, dont 78.845 femmes, qui ont eu un cancer entre 2006 et 2009 et habitant dans l’un des 16 départements (Doubs, Gironde etc.) disposant d’un registre des cancers. Le calcul du nombre de cancers évitables (15.000 par an) porte lui sur la France entière, et pas seulement sur la population de l’étude.

Pour cette étude, les chercheurs ont analysé les 15 tumeurs solides et les trois hémopathies malignes les plus fréquentes en France. L’environnement socio-économique a été déterminé par la zone géographique des individus.

Les chercheurs souhaitent désormais que «la préoccupation de réduction des inégalités sociale de santé soit permanente dans les choix politiques». Une lutte qui passe par des politiques dédiées en matière d’éducation, d’urbanisation, de transports et d’emploi, rappellent les auteurs.

Source : sante.lefigaro.fr

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