CONAKRY- Bah Oury « Par notre attitude, notre égoïsme, nous risquons de nous retrouver dans un pays totalement déchiré est démembré (interview) !

Dans un décret, le chef de l’Etat a décidé de reporter les élections législatives pour le 1er mars. Quelle est votre réaction? 

Je pense que c’est très important de souligner à l’opinion nationale que ce report est essentiellement d’ordre technique et que la CENI qui est l’organe chargé d’organiser le processus électoral n’est pas prête. Comme vous le savez, les cartes d’électeurs ne sont pas encore distribués. Et d’ici le 16 février, ça risque de ne pas pouvoir être possible. C’est la raison principale de ce report qui répond à une exigence technique de la part de la CENI. 

Donc vous pensez que cela n’a rien à voir avec cette demande faite par les leaders Religieux ? 

Donc, ça n’a rien à voir avec une volonté d’apaisement, une volonté de donner une chance à la médiation que des chefs religieux ont engagé. Donc c’est très important de le souligner pour que les choses soient claires à ce niveau-là.

Certains estiment que ce report est sciemment fait pour coupler les législatives et le référendum. Qu’en pensez vous? 

La rumeur persiste que c’est une possibilité nouvelle qui est offerte pour le couplage des législatives et du référendum pour une nouvelle Constitution. Et donc comme ce sont les deux sources de problèmes majeurs dont le pays est confronté. Premièrement, en ce qui concerne la Constitution, il y a un processus illégal et anticonstitutionnel qui est engagé. Et je dis et je le répète, la Cour constitutionnelle n’a pas fait le travail conformément à sa mission et à sa qualité. Parce qu’elle devrait statuer sur la conformité d’un processus d’une nouvelle Constitution au regard de la Constitution telle qu’elle existe aujourd’hui. Ils ont répondu en disant qu’aucune disposition n’est prévue dans la Constitution de 2010 pour changer la Constitution. Donc, ceci est extrêmement important par la suite comme pour donner un gage d’avis de conformité que le fait de consulter la population est conforme à la Constitution. Bien entendu, le fait de demander et de consulter la population est conforme à la Constitution, mais demander à la population quoi ? Quelque chose d’anticonstitutionnel ou quelque chose en conformité avec la Constitution ? C’est à ce niveau-là que la confusion a été créée pour permettre dans une certaine mesure de faire croire qu’une nouvelle constitution rentre dans le cadre des dispositions en vigueur. Ce qui n’est pas le cas. Ça, c’est très important de le dire. La source des graves difficultés qui nous attende, c’est la volonté de procéder à un changement de la Constitution de cette manière en piétinant les principes d’intangibilités et en allant dans une dynamique qui n’est pas du tout en conformité avec les intérêts de notre pays et les intérêts de la sous-région. L’autre aspect, c’est la question du fichier électoral. Il y a eu audits suite aux problèmes des élections de 2015. Des audits commandés par les autorités guinéennes suite à un accord qu’ils ont signé avec des partis politiques pour procéder à l’audit. Et c’est audit de l’OIF, de l’Union européenne et de l’Union africaine indique qu’il fallait que tous les électeurs puissent repasser devant les agents de recensement pour valider les inscriptions dans le fichier. C’est la veut dire qu’il fallait reconstituer un autre fichier électoral. La CENI a indiqué qu’en 25 jours elle est capable de le faire. Elle a été capable de corrompre encore davantage le fichier de 2015 qui, au lieu d’être assaini, et encore devenu beaucoup plus corrompu. Ce qui fait quelque soit les reports qui vont être organisés, si en ce qui concerne le fichier n’est pas revu conséquemment et profondément dans le sens de son assainissement pour permettre à tous les électeurs guinéens d’être enrôlés de la manière la plus transparente et équitable, le reste ce serait peine perdue Parce qu’on s’en sortirait pas.

Et si ce report était  une manière de permettre aux principaux partis politiques membres du Fndc de rentrer dans le processus, seriez vous prêts à y aller finalement? 

Il y a des rumeurs qui persistent dans ce sens que certains souhaiteraient ardemment être inscrits et rattraper la locomotive de la participation. Je dois être très clair à ce niveau-là. En ce qui nous concerne, nous ne sommes pas dans cette dynamique parce qu’il faut que les gens comprennent le fait d’obtenir un poste de député alors que vous sacrifiez l’avenir de la paix, vous sacrifier l’avenir et la stabilité de votre pays. Vous risquez par votre attitude d’amener votre pays à sombrer encore beaucoup plus qu’il ne l’a été par le passé. Je pense que c’est la question fondamentale qui est posé à chacun d’entre nous. Et ce n’est pas une construction théorique pour faire croire aux gens que le pire est devant nous pour avoir l’air de faire peur alors qu’en réalité de ce qu’on dit est purement imaginaire. Des pays qui étaient plus stable que le nôtre ont sombré. Le Mali tel qu’il est aujourd’hui, la paix n’est pas dans une bonne partie du territoire. Des communautés maliennes sont devenues des réfugiés dans leur propre pays. Un pays comme le Burkina est encore dans une dynamique analogue au Mali. Des pays comme la Centrafrique qui a le même profil que la Guinée pendant une bonne période régulièrement des crises et des crises qui n’est pas parvenu à se stabiliser et aujourd’hui démembrée. Et aujourd’hui en Guinée, la responsabilité de tous les acteurs qu’ils soient de l’opposition ou du pouvoir c’est de se dire allons-nous sacrifier la paix dans ce pays? Nous n’avons pas pu parvenir à donner un minimum de confort à l’ecrageante majorité de nos compatriotes. Et par notre attitude, par notre égoïste, nous risquons de les engloutir et au risque de se retrouver dans un contexte du pays totalement déchiré est démembré. C’est la question qui est posée à chacun d’entre nous. Ce n’est pas une question de poste de député ou ceci ou cela ou l’avenir individuel de certains d’entre nous. La paix est en danger. L’avenir de la Guinée et de ses enfants c’est notre principal souci.

Quel regard portez-vous à ceux qui pensent que ce report est inoportain ? 

Je pense que la la CENI n’était pas à mesure d’organiser les élections le 16 février. Puisque les cartes d’électeurs ne sont pas distribués. Si les cartes d’électeurs étaient distribués je pense qu’ils auraient organisé les élections le 16 février. Donc ceux qui protestent en fait, il y a une surenchère dans l’espace politique. Il y a certains de par leur vision restrictive et égoïste, c’est disent c’est une opportunité a jamais de pouvoir avoir des députés. Puisque les principaux partis ne sont pas présents donc ils estiment ils ont des opportunités d’avoir des députés et pour rien au monde, ils ne souhaiteraient que ceux-ci soient gâchés par des aménagements qui risqueraient de compromettre leur désir.

Pour le moment les élections sont répétées. Le FNDC a marqué une pause qu’est-ce que vous attendez des ses  responsables religieux en terme de négociation qui ont entamé entre vous et le président de la République qu’est-ce que vous attendez ? Et si jamais ils échouent dans ce qu’ils font quelle va être la suite au niveau du FNDC, de l’opposition ?

Moi je pense que, le chef catholique a été très explicite en demandant au président de la République de respecter la Constitution. A partir du moment où le président de la République respecte la Constitution, les autres aspects pourront être de manière sereine, discuter pour refaire correctement le fichier. Mais si c’est pour simplement de report sans que les questions de fond ne soit abordé c’est une manière de rejeté toujours la balle en avant sans pour autant pouvoir avoir une sortie de crise conséquente et heureuse. Le deuxième aspect, si les chefs religieux échouent mais le pays va échouer. La question comme je vous l’ai dit, ce n’est pas que l’un gagne et l’autre peur. La question, est-ce que nous tous nous perdons. si ceux qui pensent qu’une nouvelle constitution c’est leur volonté pour continuer à vivre, je leur dis vous risquez de vous compromettre, de compromettre l’avenir de votre pays et de vous compromettre également. Et c’est serait malheureusement désastreux et ce serait aussi désastreux pour la stabilité de la région

Et en ce moment les manifestations vont-elle reprendre ? 

Vous savez les manifestations ce qui risque d’arriver si ceux qui veulent aller dans le sens de la volonté présidentielle actuellement continuent c’est autre chose qu’on risque de voir. C’est une profonde déstabilisation de la Guinée qui va s’engager. Et les manifestations, on dira que c’était le moindre mal, parce que ce qui risque d’arriver c’est l’insécurité qui va s’agrandir, c’est l’autorité de l’État qui va disparaître et l’insécurité de manière générale avec des aventures qui peuvent survenir à tout moment. Parce qu’il faut qu’on le dise pendant qu’il est temps. Il ne faut pas le dire lorsque que c’est trop tard. Lorsque vous utilisez de manière abusive les forces de répression croyant que vous allez étoffé la volonté d’un peuple d’avoir la liberté, d’avoir sa dignité, d’avoir sa sécurité de pouvoir agir en tant que citoyen, vous risquez à la longue de perdre le monopole et l’exclusivité de l’utilisation de la force. L’autorité de l’État dans une certaine mesure s’appuie sur l’exclusivité par les pouvoirs publics de disposer de force pour maintenir l’ordre pour assurer un certain nombre de choses. Si vous tirez sur la ficelle de telle manière que la ficelle ne soit plus totalement rompu, c’est que vous déstabilisez votre pays. Il y a des discours, il y a des langages qui veulent accélérer ce processus et c’est qui est encore beaucoup plus dramatique, ce sont des gens qui sont en situation de responsabilité qui tienne ce discours d’appel a des milices etc.. Or dans un État de droit dans une République, des propos des ces genres devraient être sanctionné par le procureur pour demander les personnes qui tiennent ce discours de porter plainte contre elles pour atteinte à la sécurité nationale et à la sûreté du pays. C’est extrêmement grave ce qui se passe à l’heure actuelle et les gens sont en train de fabriquer des éléments d’une dangerosité extrême pour le pays et pour eux-mêmes.

Quel regard portez-vous à ces leaders en courses aux élections qui décident de porter plainte contre la CENI ? 

Vous savez il y a tellement de personnes qui se retrouvent dans ce qu’on appelle la classe politique qui ne sont ni que par la satisfaction de leur propre désir et de leur propres intérêts. La Guinée, ça n’a pas de sens pour eux. L’intérêt national, c’est purement théorique et fictifs pour eux. La stabilité de leur pays, leur importe peu. C’est comme s’il faut aller au mangeoire prendre tout ce qu’on a comme si vous avez les charognards. Tout est bon pour les charognards. Et malheureusement certains se comportent comme cela vis-à-vis de leur pays vis-à-vis de leur peuple et vis-à-vis de l’avenir de tous. Mais je pense que c’était de cécité s’il savaient les risques qu’ils font courir le pays, ils se hâteraient de désister, de participer à ce processus électoral. Parce que ça permettrait par ce biais-là de renforcer le camp de ceux qui sont pour la paix, de ceux qui sont pour la stabilité du pays. merci

 

 

Louis De Funès Diallo 

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