Quatre mois après la chute de Kaboul, l’Afghanistan s’enfonce dans la crise alimentaire. D’après l’ONU, plus d’un Afghan sur deux sera confronté à la pénurie de nourriture cet hiver. Et les 280 millions de dollars d’aide d’urgence débloqués ce samedi 11 décembre par la Banque mondiale seront loin de suffire à éviter la famine.
Le problème, ce n’est pas l’approvisionnement. Les étals sont pleins de kiwis, de bananes, de persil, de yaourt fermenté ou de courges. La crise se joue du côté des clients qui n’ont plus rien pour s’acheter à manger.
Comme cette femme en burqa qui se précipite vers nous, complètement affolée : « J’ai 9 enfants, ça fait trois jours qu’ils n’ont pas mangé… J’ai un loyer de 4 000 afghanis [36 euros] par mois, on n’a plus aucun revenu… Est-ce que je dois vendre mes enfants ? Moi, je veux bien les vendre, mais il n’y a personne qui peut payer… Ils ont tellement faim… Je ne peux pas supporter de les voir comme ça… Je préfère en vendre un pour garder les autres en vie. »
Difficulté pour les vendeurs aussi
Les plus pauvres avaient l’accès à l’aide humanitaire, mais avec le changement de régime, tout s’est déréglé. Et par ricochet, la pénurie frappe aussi les commerçants. « Vous savez, on ne peut rien faire, balaie ce vendeur de riz et de légumes secs. On ne vend plus rien, en quatre mois, j’ai perdu 90% de mon chiffre d’affaires. On est dépendants de nos clients, qui ont besoin de travailler. Mais ils ne sont plus payés… Comment pourraient-ils venir acheter quoi que ce soit ? »
À qui la faute ? « Aux Américains, dit-il, qui ne veulent pas nous rendre l’argent bloqué chez eux. Ce n’est pas celui des Talibans, cet argent, c’est celui des Afghans. »